Bourses sous pression

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C’est la panique aujourd'hui sur les marchés financiers. La raison : la faillite de la Silicon Valley Bank (SVB) aux États-Unis, entre autres. Cette banque était principalement spécialisée dans la collecte de dépôts d’entreprises technologiques. De l’argent que SVB investissait ensuite dans des obligations. Avec la hausse des taux d'intérêt, la valeur de ce papier a chuté de façon significative. Les entreprises technologiques, quant à elles, avaient de plus en plus besoin d'argent et redemandaient donc leur argent. De l'argent qui ne peut être débloqué que si ces titres à taux fixe (obligations) sont vendus à perte. Résultat : une crise de liquidité, avec un parfum disons de nouvelle crise bancaire. Le gouvernement américain est intervenu dimanche de manière décisive et a publié un certain nombre de mesures pour limiter les risques, dont un régime de garantie des dépôts concernés. Etant donné que cela rappelle l'année catastrophique de 2008, les investisseurs sont très inquiets. Quelques commentaires de notre part.

  1. Le président américain s'est empressé de déclarer que le système bancaire américain est sûr et que tout est sous contrôle. L'intervention rapide du gouvernement pour prévenir le pire est à saluer, mais un accident arrive rarement seul. Précisément parce que ce malheur était le résultat d'une hausse rapide des taux d'intérêt, d'autres dossiers de ce genre menacent de faire surface. Autrement dit, la nervosité des marchés pourrait durer un certain temps, surtout si un ‘effet domino’ est imminent.

  2. A propos du secteur bancaire (ainsi que des compagnies d'assurance). Pendant des années, en raison des taux d'intérêt toujours plus bas, les valeurs financières se sont retrouvées avec des gains latents, qui ont fondu comme neige au soleil l'an dernier et sont même devenus des moins-values latentes. Cela s'applique également aux valeurs financières européennes. En raison de cette prise de conscience, ces valeurs se replient aussi fortement. Néanmoins, ce sont surtout les banques américaines dont les ratios de solvabilité (CET1) sont trop optimistes où il faut tenir compte de ces moins-values. Quoi qu'il en soit, cet événement incitera à nouveau les investisseurs à exiger une prime de risque plus élevée pour les actions concernées, qui pourraient rester volatiles pendant un certain temps. Incidemment, les banques européennes sont également affectées. En effet, elles sont confrontées à un choix: soit augmenter fortement les conditions sur les comptes d'épargne (et ainsi perdre leur financement bon marché), soit voir les clients déplacer leur argent vers des produits de courte durée (avec des taux d'intérêt beaucoup plus élevés).

  3. À propos du secteur technologique. SVB n’a rencontré des problèmes que parce que ses clients – ​​principalement des entreprises technologiques – exigeaient leur argent de retour. Cela peut en dire long sur la situation des entreprises technologiques elles-mêmes, notamment sur le fait qu'elles génèrent des flux de trésorerie insuffisants (et décevants). Une attitude prudente envers le secteur en général n'est peut-être pas une mauvaise idée.

  4. A propos de ces valeurs refuge. Les obligations d'État, en particulier, sont soudainement recherchées, entraînant une forte baisse des taux longs. Aux États-Unis, on est passé de plus de 4 % pour le papier à 10 ans à moins de 3,6 %. La baisse des taux longs peut à elle seule guérir la situation (les actions redeviennent relativement plus attractives). Naturellement, les banquiers centraux suivront la situation avec inquiétude et, à court terme, privilégieront la santé du système bancaire à la lutte contre l'inflation. Les banques centrales doivent également mener à bien un exercice difficile appelé ‘Quantitative Tightening’. Un QT qui fera mal et qui pourrait permettre aux taux d'intérêt de se " normaliser " à nouveau après la crise actuelle.

  5. À propos " Du graphique " d'il y a quelques semaines dans " L’Investisseur " : Bank of America a indiqué visuellement que la forte hausse des taux dans le passé conduisait invariablement à une crise. Les changements rapides ne restent jamais impunis.

  6. À propos d'une structure bilantaire saine. Ce qui vaut pour les banques vaut aussi pour toutes les entreprises : il est important de disposer d’un bilan sain. Les entreprises saines seront également relativement épargnées par cette crise. Les entreprises (lourdement) endettées ont longtemps eu la possibilité de se refinancer à des taux ultra bas. Les entreprises qui ne le font pas fait sont mal gérées.

  7. A propos de la stratégie du portefeuille. Chaque crise est une opportunité, cette fois ne sera pas différent. Mais on n'en est peut-être qu’au début ; le risque d'une crise plus importante est donc relativement élevé. Alors ne soyez pas trop pressé. Nous avons annoncé en page 1 du dernier magazine qu'une correction de 5 à 10% pour les bourses européennes serait même salutaire. Nous conservons donc (avec notre position limitée sur l'or) une position de trésorerie solide et supérieure à la moyenne au cas où de très bonnes opportunités d'achat se présenteraient.